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Книга Учебное пособие по французскому языку на материале текстов из романа Г.Шевалье Клошмерль

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МГИМО(У) МИД России


Кафедра французского языка № 1

Н.В. ЛОСЕВА

Учебное пособие по французскому языку              на материале текстов из романа Г.Шевалье «Клошмерль»

Москва - 2002



Предисловие

Настоящее пособие представляет собой дополнительный материал к основному учебнику французского языка для II курса Ж.А. Казаковой  и И.В. Поповой и предназначено для работы в 4-м семестре в группах основного языка и в 5-м семестре в группах второго языка на факультетах МО, МП, МЖ и политологии.

Цель пособия – совершенствование навыков чтения и понимания текста, развитие навыков устной и письменной речи, пополнение лексического запаса и закрепление грамматического материала, изученного в ходе 3-го и 4-го семестров.

Пособие включает в себя 5 текстов, взятых из романа              Г. Шевалье «Клошмерль» и связанных между собой сюжетно и тематически. Каждый текст снабжен комментариями, словарем, а также лексическими упражнениями, грамматическими упражнениями, вопросником  и творческими заданиями. Работа над пособием направлена на изучение таких лексических тем, как «Политическая борьба в обществе», «Политические партии», «Портрет политического деятеля».        

                                                                                     Автор                                                                                                                                                                                                                                                                                                           





Texte N1


Clochemerle-en- Beaujolais




A l’ouest de la route nationale N6, qui conduit de Lyon à Paris, s’étend sur une longueur d’environ quarante cinq kilomètres, une région qui partage avec la Bourgogne, le Bordelais, l’Anjou[1] l’honneur de produire les plus fameux vins de France. C’est le Beaujolais[2]. Les noms de Brouilly, Morgon, Fleurie[3] ont rendu célèbre le beaujolais. Mais à côté de ces grands noms, il en existe d’autres, plus modestes. Au premier rang de ces noms que la renommée injuste n’a pas propagés au loin, vient celui de Clochemerle-en-Beaujolais.

En passant, expliquons ce nom  de Clochemerle. Au XII-ième siècle ce pays formait une région très boisée. Une abbaye occupait l’emplacement du bourg actuel, ce qui, par parenthèse, nous donne l’assurance que l’endroit a été bien choisi. L’église de l’abbaye était entourée de très grands arbres, et dans ces arbres nichaient des merles. Quand on sonnait la cloche, les merles s’envolaient. Les paysans disaient « la cloche à merles ». Le nom est resté.

On entreprend ici une tâche d’historien, concernant des événements qui firent du bruit en 1923 et dont il fut parfois question dans la presse de l’époque[4].

Un grand projet




Au mois d’octobre 1922, vers cinq heures du soir, sur la grande place de Clochemerle-en-Beaujolais deux hommes se promenaient côte à côte, en échangeant de temps en temps quelques paroles.

        L’un de ces hommes, âgé de plus de cinquante ans, était grand, rouge de teint, encore blond. On sentait l’autorité dans sa voix et ses gestes rares. Cet homme se nommait Barthélemy Piéchut, maire de la commune de Clochemerle, dont il était le plus gros propriétaire viticulteur.

Son interlocuteur au contraire était un personnage chétif, sans âge qui portait à l’ancienne mode un lorgnon de fer dénickelé.

Ce second personnage se nommait Ernest Tafardel, instituteur, secrétaire de la mairie et conseiller du maire pour quelques écritures administratives qui exigeaient des formules compliquées.

La vanité d’Ernest Tafardel était de se croire un profond penseur, sorte de philosophe campagnard, ascétique et incompris. Tout ce que disait l’instituteur avait un tour pédagogique et sentencieux.

Au moment où débute cette histoire, Barthélemy Piéchut prononçait ces mots:

- Il faut que nous trouvions quelque chose, Tafardel, qui montre la supériorité d’une municipalité avancée.

-                    J’en suis bien d’accord, monsieur Piéchut. Mais je vous fais observer qu’il y a déjà le monument aux morts.

-                    Il en existera bientôt dans chaque commune. Il faut que nous trouvions quelque chose de plus original, qui soit mieux en rapport avec le programme du parti[5]. Ce n’est pas votre avis ?

-   Bien sûr, monsieur Piéchut, bien sûr ! On doit faire pénétrer le progrès dans les campagnes. C’est notre grande tâche à nous, hommes de gauche.

Ils se turent quelques moments, puis le maire demanda :

-            Avez-vous une idée, Tafardel ?

-            Une idée, monsieur Piéchut ? une idée...

-      Oui, une idée. En avez-vous une, Tafardel ?

-   C’est-à-dire, monsieur Piéchut... Il y a une chose à laquelle j’ai pensé l’autre jour et dont je voulais vous parler. Le cimetière appartient bien à la commune ? C’est en somme un monument public ?

-            Certainement, Tafardel.

-    Pourquoi, dans ce cas, est-ce l’unique monument public de Clochemerle qui ne porte la devise républicaine : Liberté, Egalité, Fraternité ? Est-ce qu’il n’y a pas là une négligence qui fait le jeu des réactionnaires et du curé ? N’est-ce pas reconnaître que les morts échappent à la juridiction des parties de gauche ? La force des curés, monsieur Piéchut, c’est de s’approprier les morts. Il serait important de montrer que nous avons aussi des droits sur eux.

Il y eut un grave silence, consacré  à  l’examen  de  cette

proposition, puis le maire répondit :

-  Voulez-vous mon opinion, Tafardel. Les morts sont les morts. Laissons-les donc tranquilles. On ne peut pas empêcher le curé d’entrer au cimetière, n’est-ce pas ? Et d’y aller plus souvent que les autres. Et puis les morts, Tafardel, c’est du passé. Nous devons regarder l’avenir. C’est une idée d’avenir que je vous demande.

-   Alors, monsieur Piéchut, j’en reviens à ma proposition d’une bibliothèque municipale.

-  Ne perdons pas de temps avec cette affaire de bibliothèque. Je vous l’ai déjà dit : les Clochemerlins ne liront pas vos livres. Le journal leur suffit largement. Croyez-vous que je lise tant, moi ? Trouvons quelque chose qui fasse plus d’effet, qui s’accorde avec une époque de progrès comme la nôtre. Vous ne voyez décidément rien ?

-     J’y réfléchirai, monsieur le maire... Serait-il indiscret de vous demander si vous-même...

-           Oui, Tafardel, j’ai une idée... Voilà longtemps que je la rumine.

-         Ah ! bien, bien ! fit l’instituteur.

Mais il ne posa pas de question parce qu’il  n’y a rien  de tel pour faire perdre à l’homme de Clochemerle toute envie de parler[6]. Tafardel ne manifesta même aucune curiosité. Il se contenta d’approuver en toute confiance :

- Eh bien, puisque vous avez une idée ce n’est pas la peine de chercher davantage !

Alors Barthélemy Piéchut s’arrêta au milieu de la place en jetant un regard vers la grande rue pour s’assurer qu’il ne venait personne dans leur sens. Enfin il se décida :

-  Je vais vous la dire, Tafardel, mon idée. Je veux faire construire un édifice aux frais de la commune.

-  Avec l’argent de la commune ? répéta l’instituteur.

-  Parfaitement, un édifice. Et qui aura son utilité, aussi bien pour l’hygiène que pour les moeurs... Faites voir si vous êtes malin, Tafardel. Devinez un peu...

Ernest Tafardel exprima par un geste de ses deux bras qu’il n’en avait aucune idée.

-  Je veux faire construire une vespasienne, Tafardel.

-  Une vespasienne ? s’écria l’instituteur tout saisi, tant le projet lui parut important.

-         Oui, qu’en dites-vous ?

Tafardel fit deux ou trois « hum » et dit :

          -  Pour une idée, monsieur le maire, c’est une idée[7]. Une idée vraiment républicaine. Mesure égalitaire au plus haut point[8], et hygiénique, comme vous disiez si justement. Ce sera une belle victoire démocratique, une nouvelle affirmation des immortels principes. En avez-vous parlé au Comité ?

-         Pas encore.

- Je compte un peu sur votre éloquence, Tafardel, pour présenter l'affaire et l'enlevez. Vous savez si bien fermer les bouches aux mécontents.

-         Vous pouvez compter sur moi, monsieur le maire.

Et soudain, Tafardel demanda:

-A propos, monsieur le maire, ou allons-nous le placer, notre petit édifice?

Barthélemy Piéchut eut un sourire profond et dit simplement, en se dirigeant vers la grande rue.

- Allons voir l'endroit, Tafardel.

Devant l'église, Barthélemy Piéchut s'arrêta doucement et d'un simple coup de tête, sans le montrer du doigt, il désigna l'emplace­ment.

-  C'est là qu'on le mettra, dit-il.

-  Là? demanda tout bas Tafardel avec étonnement. La vespasienne?

-  Et où pourrait-elle être mieux?

-  Nulle part, c'est vrai, monsieur Piéchut. Mais si près de l'église...  Ne croyez-vous pas que le curé...

-         C'est vous, Tafardel, qui avez peur de curé, maintenant?

-  Oh, peur, monsieur Piéchut... Oh-oh ! Je faisais une simple remarque, parce qu'il faut se méfier de ces gens-là. Toujours prêts à se mettre en  travers du progrès...

-         Enfin, Tafardel, voyez-vous un meilleur endroit?

Indiquez-le-moi. 

-         De meilleur, il n'y en a pas, c'est bien certain !

-   Alors ! Est-ce que le bien-être général ne doit passer avant toute autre chose? [9] Qu'en dites-vous, Tafardel?  Vous qui êtes un homme juste et instruit.

Avec ces petites flatteries, on obtenait de l'instituteur un dévouement sans bornes  et Piéchut le savait.

-   Monsieur le maire, dit gravement Tafardel, c'est moi qui défendrais le projet devant le Comité, si vous le voulez bien.

        Depuis quelques années, l’instituteur attendait vainement les palmes académiques qui lui auraient donné à Clochermerle un grand prestige. Le maire aurait pu faire décerner à l'instituteur la décoration qu’il désirait tant. Mais il ne se pressait pas, voulant que son secrétaire lui rendît un dernier et important service, à propos de la vespasienne.

- Ça vous ferait tant plaisir d'en parler au comité? - dit-il.

- Ce serait de votre part une marque de confiance, monsieur le maire, si vous vouliez bien m'en charger. Il s'agit de la réputation du parti. Je saurai le leur dire.

- Vous vous sentez vraiment capable d'enlever l'affaire? Ce sera dur. Enfin puisque vous le voulez...

Le maire saisit l'instituteur par le revers de sa veste à l'en­droit de la boutonnière :

- Attention, Tafardel, la victoire sera double. Cette fois vous les aurez...

- Oh, monsieur le maire, répondit l'instituteur rouge de bonheur, ce n'est pas pour cela, croyez bien...

-         Vous les aurez. J’y tiens. J’en donne ma parole,

monsieur le professeur.

-         Monsieur le maire, je vous donne la mienne que l’im- 

possible sera fait...

L'instituteur mit sa main dans celle du maire. Mais il dut la retirer précipitamment pour essuyer son lorgnon qu'obscurcissait l'émotion.

 - Et maintenant, dit Barthélemy Piéchut, allons boire le vin nouveau chez Torbayon.

Etude du texte



I.                 Apprenez le vocabulaire

renommée (f) – известность, слава, популярность

        renommé - известный

        être renommé pour qch – славиться чем-либо

abbaye (f) – аббатство

entreprendre qch – предпринимать что-либо

concerner qch – относиться к чему-либо, касаться чего-

                           либо

        en ce qui concerne qch – что касается

faire du bruit – наделать шума

propriétaire (m) – хозяин, собственник

        propriété (f) – собственность

        propriété privée – частная собственность

viticulteur (m) – виноградарь

conseiller (m) – советник

municipalité (f) – муниципалитет

faire le jeu de qn – играть на руку кому-либо

saccorder avec qch – сочетаться, соответствовать чему-

                                    либо

être en rapport avec qch – соответствовать, вступать в

                                            контакт с чем-либо

sens (m) – направление

        Sens unique ! – Одностороннее движение.

à contresens – наоборот, в противоположном

 направлении

aux frais de – на средства

moeurs (f,pl) – нравы

vespasienne (f) – общественный туалет

décerner qch à qn – присудить, наградить

décoration (f) – награда

enlever laffaire – успешно провести дело

revers (m) de la veste – отворот пиджака

boutonnière (f) – петлица

II.              Commentaires lexicaux


1. 
Левые – правые


Un parti de gauche (de droite) – левая (правая) партия

Un homme politique de gauche (de droite) –

              политический деятель левого    (правого) толка

La gauche – левые (силы)

La droite – правые (силы)


2. 
Autorité – prestige




autorité (f) – власть, властность, влияние

autorités (f, pl) – власти, органы власти, администрация

prestige (m) – авторитет (престиж)





3. 
Place – emplacement – endroit


place (f) – 1) площадь  Les deux hommes se dirigèrent

                                      vers la place de l’église.

                2) место  Il n’y a plus de place libre dans la salle.                          

                                Il a cédé sa place à une vieille dame.

                                L’instituteur remit le livre à sa place.

                              Qui a eu la première place au concours?

emplacement (m) –  место, местонахождение,

                                 расположение

                            La municipalité approuva l’emplacement de la nouvelle école.

                            Aujourd’hui à l’emplacement de la Bastille se trouve la Colonne de Juillet.

endroit (m) – место, местность, край, уголок

                            En été cet endroit est visité par de

                            nombreux touristes.

                           Il m’a montré les endroits les plus

                            pittoresques de la ville.

                           Allons voir l’endroit, Tafardel !



III.          
Révision grammaticale


A. Observez l’emploi de la construction causative dans les phrases suivantes. Traduisez les phrases.

1)    On doit faire pénétrer le progrès dans les campagnes.

2)    Faites voir si vous êtes malin, Tafardel.

3)    Je veux faire construire une vespasienne.

4)    Le maire aurait pu faire décerner à l’instituteur la décoration qu’il désirait tant.
B. Observez l’emploi de l’article indéfini dans les phrases suivantes. Traduisez les phrases. Attention ! Rappelez-vous que l’article indéfini peut se traduire en russe par les mots tels que «
один
», «
какой
-
нибудь
», «
некоторый
» et par d’autres moyens.


1)   Avez-vous une idée, Tafardel?

2)   Il y a une chose à laquelle j’ai pensé l’autre jour.


3)   Est-ce qu’il n’y a pas là une négligence qui fait le jeu des réactionnaires?


4)   Je veux faire construire un édifice aux frais de la commune.


5)   Enfin, Tafardel, voyez-vous un meilleur endroit?

C. Traduisez les phrases suivantes en faisant attention au verbe « avoir ».

1)   Nous avons aussi les droits sur eux.

2)   Tout ce que disait l’instituteur avait un tour pédagogique et sentencieux.

3)   Parfaitement, un édifice. Et qui aura son utilité, aussi bien pour l’hygiène que pour les moeurs...

4)   Barthélemy bien eut un sourire profond.
IV.          Traduisez du russe
1)   Имя Клошмерля было несправедливо обойдено славой.

2)   Скандал в Клошмерле - это история, которая наделала шума в 20-е годы.

3)   Об этом часто заходила речь в газетах того времени.

4)   Это был высокий краснолицый человек. В его голосе и жестах чувствовалась властность.

5)   Советник мэра был человеком тщедушным. Он считал себя великим, но непризнанным философом.

6)   Считаете ли вы, что строительство публичной библиотеки отвечает принципам нашей партии.

7)   Мы должны нести прогресс в сельскую местность.

8)   На некоторое время воцарилось молчание.

9)   Что касается мэра, то у него был свой собственный план.

10)   Наш передовой муниципалитет должен проявить инициативу и смелость.

11)   Я хотел бы построить некое сооружение на общественные деньги.

12)   Если вы окажетесь в состоянии успешно провести  дело,  это будет двойная победа.

13)   Даю вам слово, что вы получите награду.

14)   Он носил орден в петлице пиджака.
V.             Questions et devoirs sur le texte
1)   Décrivez la situation géographique de bien

2)   D’où vient le nom de bien ?

3)   Qui sont les personnages principaux du texte ? A quel parti politique appartiennent-ils ?

4)   Quelles étaient les propositions de Tafardel que le maire a rejetées ? Pourquoi ?

5)   Quel était le projet du maire ? Quel endroit a-t-il choisi pour faire construire la vespasienne ? Pourquoi ?

6)   Quel service M. bien a demandé à Tafardel ?

7)         Quelles étaient les ambitions secrètes de l’instituteur ? Comment le maire en a profité ?

8)   Retrouvez dans le texte les « petites flatteries » à l’aide desquelles, selon l’auteur, « on obtenait de l'instituteur un dévouement sans bornes ».

9)   Retrouvez dans le texte toute l’information concernant le maire et l’instituteur. Faites les portraits des deux personnages.




Texte N

2


Inauguration triomphale

                                                                             

Cette année le printemps fit son apparition quinze bons jours avant le lever de rideau prévu par les metteurs en scène des saisons. Cela débuta par une saute de tempéra­ture. Dans la nuit du 5 avril 1923 un petit coup de vent chassa les nuages noirs. Et le soleil parut rendant plus gais les garçons et les filles, moins grognons les vieux, plus compréhensifs les parents, un peu moins bêtes les policiers. Mme Fouache vendait plus de tabac, l'auberge Torbayon était pleine chaque soir, le curé Ponosse faisait meilleure recette à la quête[10],  le notaire Girodot préparait des contracts de mariage, Tafardel préparait un monde meilleur.

- Bon Dieu! Quel cadeau, une journée pareille!     

Ce temps-là arrivait juste à temps pour la fête de l'inau­guration fixée au sept avril, un samedi, ce qui permettait de se reposer le dimanche.

Cette manifestation allait affirmer la victoire de Barthélemy Piéchut et de Tafardel. Encore caché sous une bâche, la vespasienne était construite à l'entrée de l'impasse des Moines. Inspirée par le maire, toujours désireux d'attirer à  bien quelques personnalités de la politique, la muni­cipalité avait décidé d'organiser à cette occasion une fête. On avait annoncé la réunion sous le nom de "Fête du vin de bien" mais la vespasienne en était le véritable motif. On pouvait compter sur la présence du sous-préfet, du député Aristide Focard, de plusieurs conseillers départementaux, de plusieurs maires de pays voisins, de trois présidents de syn­dicats vinicoles; et sur la présence du poète Bernard Samothrace qui viendrait des environs avec une ode composée tout exprès. Enfin le plus célèbre des enfants de bien, Alexandre bien, ancien ministre, avait promis d’être là.

Le matin de la mémorable journée fut merveilleux. Une voi­ture fermée alla prendre à Villefranche où il avait couché, Alexandre bien Cette voiture revint vers les neuf heures, juste comme en arrivait une autre, de laquelle descen­dit Aristide Focart, le député.

Les deux hommes se trouvèrent nez à nez sans plaisir. Aristide Focard disait à qui voulait l'entendre que l'ancien ministre était "une vieille ganache tarée[11], dont la présence dans nos rangs donne des armes à nos ennemis", et bien nommait Focard  «un de ces petits arri­vistes sans scrupules, qui sont la plaie du parti et nous dégradent aux yeux du public.»  Appartenant au même parti, ces messieurs n’ignoraient pas la bonne opinion qu’ils avaient l’un de l’autre. Mais la politique enseigne aux hommes de se dominer. Ils s’ouvrirent tout grands les bras et s’embrassèrent.

Charmée de voir quelle fraternité unissait ses dirigeants, la foule, saisie de respect, admirait leur embrassade. Lorsqu'elle eut pris fin, Barthélemy Piéchut s'avança et des appels amicaux partirent de tous côtés: «Bravo bien! - Nous sommes fiers, monsieur le ministre! - Bon­jour Barthélemy!    - Bonjour, mon vieil, mon cher ami! - Très bien, votre idée!»

- Quel temps magnifique! disait bien Et quel plaisir j’éprouve à me revoir ici, dans mon vieux bien! Je pense souvent à vous avec émotion, mes chers amis! ajouta-t-il à l'adresse des premiers rangs de spectateurs.

- Cela fait longtemps, monsieur le ministre, que vous avez quitté bien ? demanda le maire.

- Longtemps? Cela doit faire plus de quarante ans... Oui, plus de quarante ans. Vous aviez encore la morve au nez[12], mon bon Barthélemy.

- Hé, monsieur le ministre! J'hésitais déjà entre la morve et la moustache.

- Mais vous n'avez pas encore choisi! répliqua bien, en éclatant dé rire.

A ce moment un inconnu de grande taille, un rouleau de pa­pier à la main, s'approcha de l’ancien ministre.

- Monsieur le ministre, dit Barthélemy Piéchut, voulez-vous me permettre de vous présenter M. Bernard Samothrace, le célèbre poète?

- Volontiers, mon cher Barthélemy, avec plaisir, avec grand plaisir. Ainsi, mon cher monsieur, vous êtes poète? C’est très bien ça, poète... Et dans quel genre faites-vous? Triste, gai, plaisant? De la chansonnette, peut-être?

- Je fais tous les genres, monsieur le ministre.

- Oh, vous êtes un vrai poète, comme les Académiciens. Très bien, très bien! Je vous dirai que moi, les vers...

Pour la seconde fois depuis son arrivée à bien l'ancien ministre eut un de ces mots qui tombent si bien et qui font tant de popularité d'un homme politique.

- Quant aux vers, dit-il, je ne connais bien que les vers de terre. Vous comprenez, cher monsieur Samothrace, j'étais à l'Agriculture.

Cependant le cortège se dirigeait vers la place de bien où une estrade était dressée. La série des discours débuta par quelques mots de bienvenue et de remerciements que prononça Barthélemy Piéchut. Il n’en dit pas plus qu'il n'était nécessaire et se hâta de donner la parole à Bernard Samothrace qui devait réciter sa poésie d'accueil à Bourdillat. Le poète déplia son rouleau et commença à lire.

Assis dans son fauteuil, Bourdillat écoutait en secouant parfois sa tête grise. Il se pencha vers Piéchut.

- Dites-moi, Barthélemy, comment appelez-vous ce genre de vers?

- Des alexandrins[13], monsieur le ministre, dit Tafardel qui était assis derrière.

- Des alexandrins? fit Bourdillat, Ah! C’est gentil, ça! Ce garçon est bien, très bien! Il lit comme un acteur de la Comédie Française.

L'ancien ministre pensait qu'on avait choisi les alexandrins par délicate attention, parce qu'il se nommait Alexandre.

Le poème terminé, tandis que les Clochemerlins applaudissaient et criaient: «Vive Bourdillat! » Bernard Samothrace, ayant roulé son papier, l’offrit à l’ancien ministre qui serra le poète sur son coeur.

Alors Aristide Focart se leva. Récemment élu, il apparte­nait à l’extrême gauche du parti.  Il avait la fougue de la jeunesse qui a tout à gagner[14] et de l'ambition qui n’est pas satisfaite. Pour arriver plus vite à ses buts il voulait chas­ser les vieux élus qui désiraient ne plus voir rien changer, n’ayant souci que de durer[15]. Dans un certain clan, on commen­çait à parler d'Aristide Focart comme d'un homme de demain. II le savait, de même qu’il connaissait la nécessité de placer dans chacun de ses discours des phrases agressives destinées à satisfaire la clientèle fanatique sur laquelle il s'appuyait.  A Clochemerle, il ne put se retenir de prononcer des paroles qui visaient Bourdillat.

Le discours de Focart souleva l'enthousiasme. Alexandre Bourdillat donna lui-même le signal des applaudissements en disant à voix haute :

- Eh, bravo! Très bien, Focart!

Puis, changeant de figure, il dit au maire de Clochemerle, son voisin de gauche :

- C'est une fripouille, une sale fripouille, ce Focart! Il cherche à me déboulonner par tous les moyens, pour faire son chemin. Et c'est moi qui l'ai fait, c'est moi qui l'ai porté sur ma liste il y a trois ans, cette petite crapule! Il ira loin, celui-là, avec ses dents longues.

Arriva le tour de Bourdillat lui-même, qui devait parler en dernier lieu. II tira son lorgnon et quelques feuilles de papier qu'il se mit à lire avec application. Dire qu’il n’était pas orateur serait insuffisant.

Il trébuchait lourdement dans son texte. Les Clochemerlins étaient pourtant ravis à cause du soleil, et parce qu'il était rare de voir tant de messieurs à ce point affirmatifs[16], rassemblés sur la grande place du bourg. Bourdillat annonçait comme les autres un avenir de paix et de prospérité, en termes vagues mais grandioses, qui ne diffé­raient pas beaucoup de ceux qu'avaient employés ses prédécesseurs à la tribune.

Soudain la fin d'une phrase prit un éclat extraordinaire qui ne devait rien au sens, mais à la façon dont elle fut prononcée.

- ... Tous ceux qui-z-ont été des vrais Républicains !

« Oh ! beau ! Bourdillat est en grande forme » se dit à lui-même le sous-préfet.

- Errare humanum est[17], dit Tafardel d’un air érudit. Lapsus, lapsus, simple lapsus ! et qui n’enlève rien à la beauté des idées.

- C'est étonnant, dit le notaire Girodot à l'oreille de son voisin qu'ils ne l'aient pas fourré à l'Instruction publique !

Quant au député Focart qui étouffait de fureur, il ne cacha pas au maire de Clochemerle sa façon de penser:

- Quelle ganache, non, mais quelle ganache, ce Bourdillat? Et dire qu’[18] on a pu faire de ça un ministre.

Cependant Bourdillat poursuivait son discours, ajoutant les unes aux autres des formules éprouvées par quarante années de réunions publiques. Enfin il toucha aux dernières lignes de ses feuilles, et l'enthousiasme des Clochemerlins fut à son apogée. Les officiels se levèrent et se dirigèrent par la grande rue vers le centre du bourg, suivis de la foule. On allait donc inaugurer le petit édifice.

Les pompiers de Clochemerle retirèrent la bâche et le monument apparut dans sa sobriété utile. On parla de la baptiser au vin de Clochemerle, en brisant le goulot d'une bouteille sur la tôle. Le sous-préfet alla chercher dans la foule la belle Judith Toumignon, qui vint se mêler aux personnalités officielles.

Ce fut elle qui baptisa le monument et le vieux Bourdillat, pour la remercier, l'embrassa sur les deux joues. Focart et plusieurs autres voulurent suivre cet exemple. Mais elle se dégagea en disant :

- Ce n'est pas moi qu'on inaugure, messieurs!

Enfin, arriva le moment d'aller à table.  A l'auberge Torbayon on servit un banquet de quatre-vingts couverts. Avec ces accumulations politiques et gargantuesques de gigots, de gibier, de vieilles bouteilles, de toasts et de nouveaux discours, il dura cinq heures d'horloge[19].

Puis on remit en voiture Bourdillat, Focart, le sous-préfet, et quelques personnages de marque dont le temps était mesuré, parce qu'ils avaient déjà en poche d’autres discours, d'autres promesses, et les trajets prévus un mois à l'avance des inau­gurations et banquets où l'on demandait la présence de ces dévoués serviteurs du pays.

Cette journée fut en tous points remarquable pour les Clochemerlins, mais elle fut unique pour l'un d'eux, Ernest Tafardel, à qui Bourdillat avait décerné les palmes, avec la permission du ministre. Cet emblème de son éclatant mérite ren­dit à l'instituteur une nouvelle jeunesse, au point qu'on le vit folâtrer comme un collégien et boire d’une manière inaccoutumée jusqu’à ce que le dernier établissement fermât ses portes. Alors ayant attaqué un refrain frivole, il entreprit de regagner l’école, expédition qui lui prit beaucoup de temps et lui coûta un verre de son lorgnon, perte qui fut le résultat d’une série de chutes malheureuses. Il réussit pourtant à retrouver l’école et s’endormit tout habillé sur son lit, parfaitement ivre.

Etude du texte

III.           Apprenez le vocabulaire
faire son apparition - появляться

grognon – ворчливый, брюзгливый

compréhensif - понимающий

inau­gurer -  торжественно открывать

    inau­guration (f) – торжественное открытие

bâche (f) - брезент

impasse (f) – тупик

être désireux de faire qch – стремиться сделать что-либо

personnalité (f) de la politique – крупный политический              

                                                   деятель

député (m) – депутат

président (m) – 1) президент; 2) председатель

syndicat (m) – профсоюз

arriviste (m) – выскочка, карьерист

scrupule (m) – совестливость, щепетильность

    sans scrupules – бессовестный

plaie (f) – бич, бедствие

ignorer qch – не знать

dirigeant  (m) – руководитель

vers (m, pl) – стихи

ver (m) – червяк

dresser qch – устанавливать, воздвигать

récemment – недавно

l’extrême gauche – крайне левые

arriver à ses buts – достигать своих целей

viser qn, qchбыть нацеленным на что-либо,         

                        направленным против чего-либо

changer de figure – измениться в лице

fripouille (f) – бездельник, жулик

déboulonner – подрывать авторитет

crapule (f) – подлец, негодяй

prospérité (f) – процветание

en termes vagues – в туманных выражениях

prédécesseur (m) - предшественник

pompier (m) – пожарный

sobriété (f) – строгость (стиля)

baptiser – крестить

se dégager – высвобождаться

mérite (m) – заслуга

folâtrer – резвиться

établissement (m) – заведение

refrain (m) - мотив




II.               Commentaires lexicaux
1.     rendre + adjectif



Faites attention aux différentes façons de traduire la construction rendre +adjectif.

1) сделать кого-то каким-то

   
Les

d
é
sillusions

de

sa

vie

l

ont

rendu

soup
ç
onneux
. – Жизнь, полная   разочарований, сделала его подозрительным



2) сделаться (стать) каким-либо (французское подлежащее становится русским косвенным дополнением)

    Sa longue expérience l’a rendu prudent. –
Благодаря
 


   
накопленному опыту, он стал осторожнее.



3) русский глагол узкого значения

    Le soleil rendit plus gais les garçons et les filles. – На


   
весеннем солнышке  молодежь повеселела.




2.     se mêler à (de)



Le sens du verbe se mêler varie en fonction de son régime

Se mêler à qch – смешиваться с …, присоединяться к …

Se mêler de qch – вмешиваться, соваться, участвовать в

                               чем-либо

                              De quoi te mêles-tu ? – Какое

тебе

дело
?


                              Mêle-toi de tes affaires!


3.     public (-que)



public (-que) adj
. –
общественный, народный, государственный

        Attention aux variantes de traduction qui dépendent du contexte. L’adjectif public fait aussi partie de nombre d’expressions figées.

        homme public – общественный деятель

        finances publiques – государственные финансы

        instruction publique – народное образование

        opinion publique – общественное мнение

rendre public (-que) – обнародовать

public (m) – население, общественность, публика

        interdit au public – посторонним вход воспрещен

        en public – публично, при всех



III.          
Révision grammaticale

    A. Comblez les lacunes à l’aide des pronoms ou adverbes relatifs précédés ou non de prépositions.

1)    Aristide Focard disait que  l'ancien ministre était « une vieille ganache tarée, ________ la présence dans nos rangs donne des armes à nos ennemis », et Bourdillat nommait Focard «un de ces petits arri­vistes sans scrupules, ________ sont la plaie du parti».

2) Cependant le cortège se dirigeait vers la place de Clochemerle ________ une estrade était dressée.

3) Il se hâta de donner la parole à Bernard Samothrace _________ devait réciter sa poésie d'accueil à Bourdillat.

4)    II plaçait dans chacun de ses discours des phrases agressives destinées à satisfaire la clientèle fanatique __________ il s'appuyait.

5)    Puis on remit en voiture Bourdillat, Focart, le sous-préfet, et quelques personnages de marque __________ le temps était mesuré.

6)    Cette journée fut  unique pour Ernest Tafardel ________ Bourdillat avait décerné les palmes.
B. Employez les prépositions qui conviennent s’il le faut.

1. La muni­cipalité avait décidé ___organiser ___ cette occasion une fête. 2. On pouvait compter ___ la présence du sous-préfet.  3. Des appels amicaux partirent ___ tous côtés. 4. Un inconnu s'approcha ___ l’ancien ministre. 5. Je pense souvent ___ vous avec émotion. 6. Il se hâta ___ donner la parole à Bernard Samothrace. 7. Il se pencha ___ Piéchut. 8. Les vieux élus désiraient ___ ne plus voir rien changer. 9. Il cherche ___ me déboulonner. 10. Il se mit ___lire avec application. 11. Tafardel a prononcé cette phrase ___ air érudit. 12. Quant au député Focart, qui étouffait ___ fureur, il ne cacha pas ___ maire  sa façon de penser. 13. Les officiels se levèrent et se dirigèrent ___ la grande rue ___ le centre du bourg, suivis ___ la foule. 14. Bourdillat l’embrassa ___ les deux joues. 15. Il réussit pourtant ___ retrouver l’école.
IV.  Traduisez du russe
1.     Потом на трибуне появился бывший министр.

2.     Благодаря хорошей погоде жители повеселели, старики стали меньше ворчать, а полицейские немного поумнели.

3.     Церемония открытия была назначена на 7 апреля.

4.     Мэр, стремившийся привлечь в Клошмерль как можно больше важных лиц, решил устроить праздник.

5.     Ожидалось присутствие политиков, мэров соседних коммун, деятелей профсоюзов.

6.     Присутствие в наших рядах таких бессовестных политиков играет на руку нашим врагам.

7.     В начале церемонии мэр произнес несколько приветственных и благодарственных слов.

8.     Фокар был недавно избран депутатом и принадлежал к крайне левому крылу партии.

9.     Этот негодяй стремится всеми средствами подорвать мой авторитет.

10. Оратор в туманных выражениях говорил о грядущем процветании.

11. Потом появились пожарные и сняли брезент.

12. Этот выскочка стремится всеми средствами удовлетворить свое честолюбие.

13.  Он переменился в лице, но ничего не сказал. Политики умеют держать себя в руках.

14. Мэр не хотел, чтобы священник вмешивался в дела муниципалитета.

15. Журналисты смешались с толпой присутствовавших на празднике.
V.               Questions sur le texte.
1)   Quel temps faisait-il en ce début du mois d’avril à Clochemerle ?

2)   Qui étaient les personnalités de la politique invitées par le maire à participer à la fête ?

3)   Décrivez la rencontre de Focart et Bourdillat ? En réalité, qu’est-ce que les deux hommes pensaient l’un sur l’autre ?

4)   Comment Bourdillat salua-t-il ses compatriotes ?

5)   Bourdillat, s’y connaissait-il en poésie ? Etait-ce un homme instruit ? Prouvez votre opinion par quelques épisodes du texte.

6)   Quelle est la caractéristique donnée à Aristide Focart par l’auteur ?

7)   Pourquoi le discours de Focart provoqua-t-il la colère de Bourdillat ?

8)   Comment était le discours de Bourdillat ? Quelle réaction provoqua-t-il chez les Clochemerlins et chez Focart ?

9)   Qui fut invité à inaugurer et à baptiser le nouvel édifice ? Coment se passa l’inauguration ?

10)         Pourquoi cette journée fut-elle particulièrement remarquable pour Ernest Tafardel ?
VI.            Devoirs sur le texte.
1.          Commentez la phrase suivante : La politique enseigne aux hommes politiques de se dominer.

2.          Décrivez les rapports entre Bourdillat et Focart en employant le vocabulaire suivant :


homme politique, député, ancien ministre, homme de demain, arriviste ;

jeune (vieille) génération ;

sans scrupules ;

déboulloner, viser, arriver à ses buts, faire son chemin, désirer ne rien voir changer, n’avoir souci que de durer, satisfaire son ambition, étouffer de fureur



Texte N3

Des mesures s’imposent
A Monseigneur de Giaccone, archevêque de Lyon, qui se tenait à son bureau, on vint annoncer la baronne de Courtebiche.

        Il accueillit la baronne avec une grâce empressée et lui désigna près de lui un fauteuil.

- J’ai grand plaisir à vous voir, dit-il de sa voix douce. Vous aviez quelque chose à me confier ?

La baronne lui raconta en prenant par le début[20], les événements qui agitaient Clochemerle. L’archevêque les connaissait sans en être instruit dans les derniers détails mais il ne les croyait pas aussi importants.

- Enfin, - conclut la baronne, la situation devient réellement intolérable. Notre curé Ponosse est un brave homme mais un imbécile, un faible, incapable de faire respecter les droits de l’Eglise. Il faut mettre à la raison ce Piéchut[21], le Tafardel et toute leur clique. Il faut agir en haut lieu[22].

Il y eut un instant de silence. L’archevêque réfléchissait, la tête penchée, le regard voilé.

-         Je crois, dit-il, que nous pourrons toucher ces gens-là par Luvelat.[23]

-         Alexis Luvelat, le ministre... et ministre de quoi donc, à propos ?

-         De l’intérieur.

-  Mais c’est un des chefs de leur parti, un de nos grands ennemis, en somme.

L’archevêque sourit. Il expliqua, comme se parlant à lui-même :

        -  Il y a l’Académie Française. On ne pense pas assez à l’Académie, à son rôle de contrepoids dans les décisions de certains hommes politiques ambitieux.

C’est vraiment un admirable moyen d’action que nous a laissé là Richelieu. L’Académie nous permet d’exercer un sérieux contrôle sur la pensée française.

-         Je  ne  vois  pas  le  rapport,   monseigneur,  avec   le Clochemerle.

-         Il existe pourtant, et j’y arrive. Alexis Luvelat est dévoré du désir d’entrer à l’Académie, et pour y entrer cet homme de gauche a besoin de nous, des voix dont l’Eglise dispose sous la coupole[24] ou tout au moins de n’avoir pas contre lui l’opposition de l’Eglise. Un candidat qui a contre lui l’Eglise peut difficilement entrer à l’Académie. Ce qui explique pourquoi un Alexis Luvelat doit se montrer très prudent en ce qui nous concerne. J’ajoute – et ceci tout à fait entre nous – qu’il n’entrera pas à l’Académie de sitôt. Dans sa situation de postulant qui le rend craintif, il nous est très utile.

      - Pourtant, monseigneur, objecta encore la baronne, entre son parti et ses ambitions académiques, croyez-vous que Luvelat puisse hésiter ?

-         Il n’hésitera certainement pas, répondit l’archevêque entre des doctrines vagues et des ambitions personnelles très précises. Il sait que son parti peut se contenter de discours et que nous exigeons des preuves. Ils fera les discours et nous donnera des preuves.

-         Mais alors, s’écria la baronne, vous le jugez capable de trahir !

        - C’est un bien gros mot[25]. Il faut prendre en considération qu’Alexis Luvelat est un homme politique. Il sait bien ce qu’il faut faire en toutes circonstances.

        Nous pouvons lui faire confiance. Il sera toujours contre nous, plus violemment que jamais ; mais il agira pour nous. Et je peux de mon côté vous assurer que votre bourg retrouvera bientôt la paix.

-         Il ne me reste donc qu’à vous remercier, monseigneur, dit en se levant la baronne.

-         Je   vous   remercie   pour  ma  part  de  vos  précieux renseignements.

La baronne prit congé.
Etude du texte
I.                 
Apprenez le vocabulaire


archevêque (m) – архиепископ

intolérable – нетерпимый, невыносимый

ministre de l’Intérieur – министр внутренних дел

contrepoids (m) – противовес

ambition (f) – честолюбие, амбиция, стремление

    ambitieux – честолюбивый

exercer un contrôle sur qch – осуществлять контроль над чем-либо

rapport (m) – отношение, связь

être dévoré du désir – быть снедаемым, одержимым желанием

voix (f) – голос (в том числе при голосовании)

postulant (m) – кандидат

craintif – боязливый, осторожный

se contenter de qch – довольствоваться чем-либо

preuve (f) – доказательство

    prouver qch - доказывать     

faire preuve de qch (de compréhension, de souplesse) - проявлять (понимание, гибкость)

        prendre en considération – принимать во

                                                    внимание

      prendre congé – распрощаться, откланяться

     
       

II.              
Commentaires lexicaux

1. 
доверять



confier qch à qn – доверять что-либо кому-либо (переходный глагол)   

         Il a confié le secret à son frère.

         Vous avez quelque chose à me confier ?

faire confiance à qn – доверять кому-либо (непереходный глагол), относиться с доверием          

          Nous pouvons faire confiance à cet homme.   



2. 
idée – pensée


 Les mots idée(f) et pensée(f) en français sont synonymes quand ils signifient идея
,
мысль
.  Mais certains acceptions et emplois de ces mots diffèrent.

pensée (f) – мысль (в обобщенном значении), мышление, состояние  умов

            la pensée politique - политическая мысль

            exercer le contrôle sur la pensée –

                             контролировать состояние умов                                                           

idée (f) – замысел, план, представление

          Avez-vous une idée, Tafardel ?

          Je n’en ai aucune idée.       



III.          
Révision grammaticale

 A. Observez et expliquez l’emploi de l’article devant les noms propres et les titres

1)   A Monseigneur de Giaccone, archevêque de Lyon, qui se tenait à son bureau, on vint annoncer la baronne de Courtebiche.

2)    Il faut mettre à la raison ce Piéchut, le Tafardel et toute leur clique.

3)   Un candidat qui a contre lui l’Eglise peut difficilement entrer à l’Académie. Ce qui explique pourquoi un Alexis Luvelat doit se montrer très prudent.
B. Employez les prépositions qui conviennent s’il le faut.


1)   Notre curé est  incapable ___ faire respecter les droits de l’Eglise.

2)   On ne pense pas assez ___ l’Académie, ___ son rôle de contrepoids.

3)   L’Académie nous permet ___exercer un sérieux contrôle ___ la pensée française.

4)   Il n’hésitera certainement pas ___ des doctrines vagues et des ambitions personnelles très précises.

5)   Son parti peut se contenter ___ discours.

6)   Il sait bien ce qu’il faut faire ___ toutes circonstances.

7)   Je vous remercie ___ ma part ___ vos précieux renseignements
IV.            Traduisez du russe

1.   Вы хотите мне что-то сообщить?

2.   Баронесса рассказала ему в подробностях о событиях, которые волновали жителей Клошмерля.

3.   Поскольку ситуация стала невыносимой, нужно образумить этих левых деятелей.

4.   Лювла был министром внутренних дел и одним из лидеров левой партии.

5.   Французская Академия часто играет роль противовеса в политике.

6.   Мы часто забываем об этом замечательном средстве воздействия, которое нам оставил кардинал Ришелье.

7.   Любой левый политик нуждается в поддержке церкви, если хочет быть избранным членом Академии. Ведь церковь располагает там большим числом голосов.

8.   Находясь в положении кандидата, он вынужден проявлять осторожность.

9.   Совершенно очевидно, что он будет действовать в нашу пользу. Ведь его друзья могут довольствоваться обещаниями, а мы требуем доказательств.

10.         Скоро ваш городок вновь обретет спокойствие.
V.               Questions et devoirs sur le texte
1) Comment l’archevêque reçut la baronne ?

2) Qu’est-ce que la baronne volut lui confier ?

3) Quel moyen d’action trouva l’archevêque?

4) Comment l’archevêque caractérisa-t-il le rôle de l’Académie Française dans la vie politique?

5) Pourquoi l’archevêque était-il sûr que le ministre agirait dans l’intérêt de l’Eglise? Le croyait-il capable de trahir ?

6)   Comment se termina l’entretien ?

7)   Trouvez dans le texte toutes les phrases qui servent à caractériser le comportement d’un homme politique. Etes-vous d’accord avec le point de vue de l’archevêque?  Qu’est-ce que vous pensez sur les principes des hommes politique d’aujourd’hui ?




Texte N4
Bourdillat chez le ministre



"Que me veut ce vieil idiot?"  pensa le ministre. "Si je lui disais que j'ai une conférence ou le rendez-vous avec le président du Conseil?'' Cela présentait des risques, si le visiteur apprenait qu'il ne l'avait pas reçu sans motif, il s'en ferait un solide ennemi. C'était déjà un jaloux, un ennemi (au pouvoir on n'a que des ennemis, surtout dans son propre camp) mais peu agissant. C'était un de ces adversai­res qui travaillait à le démolir, sans cesser de lui sourire. La prudence commandait de le ménager. Le ministre observait cette règle absolue: pas de ménagements pour les amis - ceux-là ne sont pas à craindre - et de grands égards[26], tous les témoignages d'estime pour les ennemis. En politique, il faut avant tout penser à désarmer l'adversaire.

Le ministre questionna le secrétaire:

-    Sait-il que je suis seul?

-    Il dit qu'il en est sûr, monsieur le ministre.

-         Allez, amenez-le, ordonna Luvelat, avec une petite

grimace.

Il se leva, dès que la porte s'ouvrit, pour aller au-devant de son visiteur, avec un air de surprise charmée. 

- Mon bien bon ami, c'est une véritable gentillesse de votre part...

- Je ne vous dérange pas, mon cher ministre?

- Vous plaisantez, mon cher Bourdillat! Vous, un de nos vieux républicains, un des piliers du parti, me déranger! Vous ne pouvez que me rendre service par vos conseils. Nous, les jeunes, nous vous devons beaucoup. Asseyez-vous, mon cher ami. Puis-je vous être utile? Rien de grave, j'espère?

Bourdillat alla droit au but.

- Les curés se foutent de nous[27], monsieur le ministre.

- De quoi s'agit-il, mon bon ami?

- De Clochemerle, dit Bourdillat, pensant étonner le ministre.

- Ah, fit Luvelat sans inquiétude.

- Vous ne savez pas ce que c'est, peut-être?

- Clochemerle?..  Mais si, mon cher Bourdillat. Comment l'ignorer? N’y êtes-vous pas né? Un charmant petit pays, deux mille cinq cents habitants.

-  Deux mille huit cent,  dit Bourdillat, avec l'orgueil du pays natal. Mais vous ignorez probablement ce qui se passe à Clochemerle? Alors que c'est tout simplement une honte, en plein XX siècle? Clochemerle va retomber au pouvoir des curés, ni plus ni moins. Figurez-vous, mon cher ministre...

-  Oui, dit Luvelat, oui, je sais... Focart me le disait précisément, il n’y a pas deux heures.

-         Focart est déjà venu ? demanda Bourdillat.

-    Il n’y a pas deux heures, je vous le répète. Il était assis dans le fauteuil que vous occupez en ce moment, mon bon ami.

-         De quoi se mêle-t-il, ce type-là? s’écria Bourdillat.

-         Mais Clochemerle fait partie de sa circonscription, il

me semble?

-  Et après?[28] Clochemerle, c’est mon pays, mon pays natal, mon cher ministre. Est-ce que cela me concerne mieux que personne, oui ou non? Moi, ancien ministre, on veut intriguer dans mon dos!

-   Il est certain, dit Luvelat, que  Focart avant de venir me trouver, aurait pu peut-être...

-         Comment, peut-être? rugit Bourdillat.

-  Je veux dire aurait dû, oui, aurait dû, certainement, vous parler. C’est par désir de ne perdre aucun temps...

La supposition du ministre fit ricaner Bourdillat. Il ne croyait pas un mot de ce que disait Luvelat qui ne prononçait ces phrases vides que pour envenimer les rapports[29] entre Bourdillat et Focart. Ce faisant[30], il appliquait un autre de ses grands principes politiques : « Deux hommes occupés à se haïr ne peuvent pas s’unir sur le dos d’un troisième ». Nouvelle forme de la vieille maxime à l’usage des princes : diviser pour régner.

Bourdillat répondit :

-   Si Focart est venu tout droit, c’est par désir de me couper l’herbe sous les pieds[31], de me faire passer pour un imbécile. Je connais cette crapule. C’est un sale petit arriviste.

-    Je crois, mon cher Bourdillat, que vous exagérez un peu, dit Luvelat. On doit reconnaître que Focart est un des hommes les plus brillants de la jeune génération, les plus dévoués au parti.

Bourdillat éclata :

-   Mais c’est un homme qui a l’intention de nous passer sur le ventre[32] à vous comme à moi.

-   J’ai pourtant l’impression d’être dans les meilleurs termes[33] avec Focart. Chaque fois que nous avons été en rapport, il s’est montré très correct. Tout à l’heure encore il m’a dit : « Nous n’avons pas toujours les mêmes points de vue, mais c’est peu de chose quand on s'estime. »  C'est très gentil, vous ne trouvez pas?

Bourdillat suffoquait de fureur: Ce cochon-là vous a dit ça? Après ce qu'il raconte de vous par-derrière[34]? Il ose parler estime? Mais il vous méprise... J'ai peut-être tort de vous dire ça?

- Mais non, Bourdillat, mais non. C'est tout à fait entre nous.

- C'est dans votre intérêt que je le dis, vous le comprenez bien.

- Mais naturellement. Alors, Focart vraiment n'est pas très tendre envers moi?

- Il raconte des horreurs. Et tout y passe[35], la vie privée comme la carrière publique. Les histoires de femmes aussi bien que les histoires de pots-de-vin[36]. Il prétend...

Tout en l'écoutant attentivement Luvelat examinait Bourdillat:

« Dire, pensait-il, que ce vieil idiot est encore un mouchard par-dessus le marché![37] Et il a pu être ministre... »

Luvelat n'éprouvait que le désir d'abréger cet entretien.

D'ailleurs Bourdillat n’avait plus grand-chose à lui communiquer car les scandales de Clochemerle l’intéressaient moins depuis qu'il se savait devancé par Focart. Il demanda une dernière fois au ministre de donner de sévères instructions pour que le pouvoir central prît des mesures énergiques en Beaujolais.

- Comptez sur moi, mon cher ami, dit Luvelat en lui serrant la main. Je suis moi-même un vieux républicain, fidèle aux grands principes du parti, et je place plus haut que tout cette liberté de pen­sée, que vous avez toujours défendue si généreusement.

Luvelat n’avait pas menti en parlant de la visite de Focart, et cette visite l’inquiétait. Elle sous-entendait des menaces, mais une troisième visite qu'il avait tenue secrète, celle du révérend chanoine Trude, émissaire de l’archevêque de Paris, en sous-entendait de plus graves. Cet ecclésiastique habile était venu spécialement pour faire comprendre à Luvela que l'église, inquiétée à Clochemerle, se plaçait sous la protection du ministre en lui promettant sa protection dans l'avenir.

Seul maintenant, Alexis Luvelat réfléchissait à ces trois visites. Il pesait les dangers qu’elles annonçaient. Forcé de choisir, ainsi qu'il arrive souvent dans une carrière comme la sienne, il était bien décidé à se rallier au clan du plus fort, en donnant à l'autre des apparences de garantie. Nul doute que l'appui le plus utile en ce moment fût celui de l’Eglise, à cause de ses ambitions académiques.

        Encore soucieux, il fit prier son chef de cabinet de passer chez lui sans retard.
Etude du texte
I.                
Apprenez le vocabulaire


adversaire (m) – соперник

démolir – разрушить, уничтожить

ménager – щадить, обращаться осторожно

        ménagement (m) – осторожность, бережное обращение

pillier (m) – столп, опора

aller droit au but – зд. говорить без обиняков

circonscription (f) – избирательный округ

dans le dos de qn – за спиной, тайком

prince (m) – зд. правитель

exagérer – преувеличивать

dévoué – преданный

avoir lintention de – намереваться

prétendre – утверждать (заведомо ложно, неискренне)

abréger – сократить, зд. поскорее завершить

entretien (f) – встреча, беседа

sous-entendre – подразумевать

        sous-entendu (m) – подразумеваемое, намек,

                                        недомолвка

chanoine (m) – каноник

se rallier à qch – примыкать

apparence (f) – видимость
II.             
Commentaires lexicaux

            Chose (f) –
вещь


Pris dans son sens le plus abstrait le mot chose ne se traduit pas.

        J’ai beaucoup de choses à faire. – У

меня

много

дел
.


        Ces choses-là ne nous intéressent pas. –
Это

нас

не

интересует
.


        Chaque chose en son temps. –
Всему

свое

время
.


Le mot chose fait partie de plusieurs expressions :

        quelque chose – что-то, что-нибудь, что-либо

( Attention ! что-нибудь серьезное, что-нибудь важное - quelque chose de grave, quelque chose d’important)

        autre chose – другое

        peu de chose – пустяки, мелочь, ерунда

        grand-chose – нечто не стоящее внимания, мелочь (dans une phrase négative)  Ce n’est pas grand-chose ! – Это

пустяки
!


              Il n’a plus grand-chose à dire. –
Ему

нечего

больше

сказать
.


Attention ! Dans certains cas le mot chose se traduit comme дело
.


        La chose est que... –
дело

в

том
,
что



        Je vais vous expliquer la chose. –
Я

расскажу

вам
,
в

чем

тут

дело
.


Curieusement, il y a aussi des cas où le mot affaire se traduit comme вещь
.


Ramasse tes affaires ! -
Собери

свои

вещи
!




III.          
Révision grammaticale


A. Observez l’emploi de l’imparfait dans la phrase suivante. Traduisez la phrase:   Si je lui disais que j'ai une conférence ou le rendez-vous avec le président du Conseil?

Traduisez en employant l’imparfait

1)   А не вызвать ли мне секретаря?

2)   А что если нам обратиться в высшие инстанции?

3)   А не открыть ли нам в Клошмерле библиотеку?
B.  Traduisez les phrases en faisant attention à la valeur de l’infinitif.

1)  Vous, un de nos vieux républicains, un des piliers du parti, me déranger!

2)   Clochemerle?. . . Mais si, mon cher Bourdillat. Comment l'ignorer?

3)   Nouvelle forme de la vieille maxime à l’usage des princes : diviser pour régner.

4)   Dire que ce vieil idiot est encore un mouchard par-dessus le marché!
           C. Observez et commentez l’emploi des modes dans les phrases suivantes.

1)   Cela présentait des risques, si le visiteur apprenait qu'il ne l'avait pas reçu sans motif, il s'en ferait un solide ennemi.

2)   - Il est certain, dit Luvelat, que  Focart avant de venir me trouver, aurait pu peut-être...

- Comment, peut-être ? rugit Bourdillat.

   - Je veux dire aurait dû, oui, aurait dû, certainement, vous parler.

3)  Il demanda une dernière fois au ministre de donner de sévères instructions pour que le pouvoir central prît des mesures énergiques en Beaujolais.

4)  Nul doute que l’appui le plus utile en ce moment fût celui de l’Eglise.
IV.         
Traduisez du russe


1.   - А не завершить ли нам поскорее эту неприятную встречу, - думал министр.

2.   Вы хотите сообщить мне что-либо серьезное?

3.   Фокар думал только о том, чтобы уничтожить своего соперника.

4.   Бывший министр говорил без обиняков, а вот Лювла изъяснялся намеками.

5.   Не будем преувеличивать недостатки этого политика.

6.   Министр был уверен, что за его спиной Фокар рассказывает о нем скандальные истории.

7.   Дело в том, что министр придерживался старого правила: разделяй и властвуй.

8.   Я не намерен щадить этих выскочек, этих бессовестных политиков.

9.   Визит священника его очень волновал, так как содержал в себе скрытую угрозу.

10.         У нас могут быть разные точки зрения, но это не имеет большого значения, раз мы уважаем друг друга.
V.            
Questions et devoirs sur le texte

1.   Pourquoi Luvelat n’avait-il pas grande envie de recevoir Bourdillat ? Pourquoi finalement accepta-t-il de le recevoir?

2.   Quel accueil réserva Luvelat à l’ancien ministre?

3.   Quelle affaire amena Bourdillat chez Luvelat?

4.   Est-ce que c’est exprès ou par hasard que Luvelat parla de la visite de Focart ?

5.   Quelle est la nouvelle formule du vieux principe « diviser pour régner »?

6.   Combien de visites concernant l’affaire de Clochemerle reçut le ministre?  Laquelle de ces visites préférait-il tenir secrète? Pourquoi ?

7.   Parlez des principes politiques de Luvelat. De quelle façon les appliquait-il? Citez des exemples.

 
TEXTE

5


Petites causes, grands effets
Fou da rage, Tafardel se rendit à la poste, où il se mit directement en relation avec les correspondants régionaux de la presse parisienne, qui à leur tour téléphonèrent d'urgence à Paris les communiqués terribles de l'instituteur. Ces communiqués parurent dans les journaux du soir de la capitale. Les dramatiques incidents de Clochemerle frappèrent de stupeur[38] les ministres et plus spécialement Alexis Luvelat, qui portait à la fois le poids de cette affaire et les responsabilités d'un intérim gouvernemental.[39]

Le président du Conseil, accompagné de son ministre des Affaires étrangères et d'une suite importante de techniciens, sé­journait alors à Genève, où il représentait la France à la Conférence du désarmement.
Toutes les nations, grandes et petites, étaient d'accord pour désarmer et convenir que le désarmement apporterait un grand soulagement aux maux de l’humanité. Il ne s'agissait plus que de concilier les points de vue, nécessairement différents, avant d’arrêter les articles d’un plan mondial.

L'Angleterre disait :

- Nous sommes le premier peuple maritime du monde, depuis plusieurs siècles. Nous possédons la moitié des colonies disponi­bles dans le monde ce qui revient à dire[40] que nous faisons la police sur la moitié du globe. Voilà le point de départ de tout désarmement.                                                                      

L’Amérique disait:

-Nous sommes dans la nécessité de nous mêler des affaires de l'Europe où tout va mal par excès d’armement[41], qui ne peut évidemment se mêler des affaires de l'Amérique, où tout va bien... Nous apportons un programme américain. En tout, les programmes américains sont excellents, car nous sommes le pays le plus prospère de la terre. Enfin, si vous n'acceptez pas notre programme, attendez-vous à recevoir nos relevés de factures[42].

Le Japon disait:

- Nous sommes prêts à désarmer... Nous avons actuellement la plus forte natalité[43]  du monde. Et si nous ne mettons pas un peu d'ordre en Chine, ce malheureux pays va sombrer dans l’anarchie[44], ce qui serait un immense désastre pour la communauté humaine.

L'Italie disait :

- Dès que nous aurons égalé en puissance l'armement de la France que nous égalons en population, nous commencerons à désarmer.

La Suisse disait:

- Etant pays neutre, appelé à ne jamais se battre, nous pouvons bien nous armer tant que nous voudrons, cela n’a pas d'importance.

 Et la Belgique:

- Etant pays neutre, dont la neutralité n'est pas respectée,  nous demandons à nous armer librement jusqu'aux dents...

Bref, toutes les nations tombaient d'accord sur une formule, qui se résumait d'un mot: «Désarmez... »
Dans la nuit du 19 septembre parvint à Genève un message chiffré qui avait trait aux vifs incidents de Clochemerle. Dès que ce message fut traduit, le secrétaire courut aux appartements du président du Conseil, afin que ce dernier en prît aussitôt connaissance. Le chef du gouvernement lut deux fois le message, et une troisième fois à voix haute. Puis il se tourna vers quelques collaborateurs qui se trouvaient là:

- Nom de Dieu, dit-il,  mon ministère peut très bien sauter sur une histoire pareille[45]. II faut que je rentre immédiatement à Paris.

- Et la conférence, monsieur le président?

- C'est bien simple: vous allez la torpiller. Trouver un moyen et vite. Le désarmement peut attendre, ça fait cinquante mille ans qu'il attend. Mais Clochemerle n'attendra pas...

- Monsieur le Président, proposa le chef des experts, il y aurait peut être moyen de tout arranger. Confiez votre plan au ministre des Affaires étrangères. Il défendra le point de vue de la France et nous le soutiendrons de notre mieux.

         - Vous n'êtes pas culotté, vous, dit froidement le président du Conseil. Vous pensez que j’ai transpiré pendant un mois sur mon plan pour le passer aujourd'hui à Rancourt, qui se taillera sur mon dos un succès personnel[46]?

- Je croyais, balbutia l’autre, voir là l'intérêt de la France...

- La France c'est moi, s'écria le président, allez vous occuper, messieurs, de renvoyer tous ces macaques dans leurs pays. Nous leur foutrons une autre conférence dans quelques mois.

- Ne craignez-vous pas, monsieur le président, que l'opinion publique en France n’interprète mal ce brusque départ?

Avant de répondre, le président du Conseil interrogea son secré­taire particulier:

- Quelles sont les disponibilités de la caisse des fonds secrets?

-  Cinq millions, monsieur le Président...

- Vous entendez, monsieur ! Cinq millions!  Avec ça, il n'y a pas d’opinion publique. Et sachez ceci: la presse française n'est pas chère... Je suis placé pour le savoir[47].  C'est dans la presse, section des affaires étrangères, que j'ai commencé ma carrière... Décidément, messieurs, nous pouvons filer. Nous désarmerons une autre fois. Allons nous occuper de Clochemerle.

Ainsi échoua, en 1925, la conférence du désarmement.
Etude du texte
I.                 
Apprenez le vocabulaire


se mettre en relation avec qn – связываться с кем-либо

à son tour – в свою очередь

urgence (f) – срочность

        urgent – срочный

        durgence – срочно

        état durgence – чрезвычайное положение

interim (m)- временное исполнение обязанностей

        par interim- временно исполняющий обязанности

ministre des Affaires étrangèresминистр иностранных

                                                       дел

séjournerнаходиться, посещать

conférence (f) du désarmementконференция по

                                                      разоружению

        désarmer – разоружаться

        armement (m) – вооружение

        sarmer jusquaux dents – вооружаться до зубов

concilier – примирять, согласовывать

disponibilité(f) – незанятость, запас

        disponibilités (f,pl) – свободные средства, резервы,      

                                         наличность

        disponible – свободный, резервный, вакантный

globe (m) – земной шар

prospère – процветающий

        prospérité (f) – процветание

égaler qn en qch – сравниться с кем-либо в чем-либо

torpiller qch– подрывать, срывать

décidément – определенно
II.              
Révision grammaticale


A.  Mettez le mot « tout » à la forme correcte. Précisez dans chacun des cas s’il s’agit d’un pronom ou d’un adjectif. Traduisez les phrases.

1)   __________ les nations, grandes et petites, étaient d'accord pour désarmer.

2)   l'Europe où ________ va mal ne peut évidemment se mêler des affaires de l'Amérique, où ________ va bien...

3)   Voilà le point de départ de ________ désarmement.  

4)   Il y aurait peut être moyen de ________ arranger.

5)   Renvoyez ________ ces macaques dans leurs pays !
B.  Comblez les lacunes par les prépositions qui conviennent.

1)  Toutes les nations étaient d'accord ____  désarmer. 2) Il s’agissait ____ concilier les points de vue différents.  3) Nous sommes dans la nécessité ____ nous mêler ____ affaires de l'Europe. 4) Nous sommes prêts ____ désarmer. 5)  Dès que nous aurons égalé ____ puissance  la France que nous égalons ____ population, nous commencerons  _____ désarmer. 6) La Suisse est un pays appelé ____ ne jamais se battre. 7) Puis le ministre se tourna ____ ses collaborateurs. 8) Allons nous occuper ____ Clochemerle.
III.          
Traduisez du russe


1.   Временно исполняющий обязанности министра находился в этот момент в Париже.

2.   Теперь оставалось лишь согласовать точки зрения.

3.   Америка, как самая процветающая страна в мире, считала возможным вмешиваться в дела Европы.

4.   Если мы позволим этому государству вооружиться до зубов, то это станет ужасным бедствием для всего человечества.

5.   Мы уже сравнились с Францией по числу населения.

6.   Премьер министр принял решение сорвать конференцию. Он не боялся общественного мнения, поскольку общественное мнение создается прессой, а прессу легко подкупить.
IV.           
Questions et devoirs sur le texte

1)   Comment les nouvelles dramatiques de Clochemerle parvinrent-elles jusqu’aux journaux de Paris?

2)   Pourquoi Alexis Luvelat se trouva-t-il le principal responsable de la situation?

3)   Exposez et commentez la position de chacun des Etats présents à la Conférence.

4)   Comment le président du Conseil apprit-il la nouvelle ?

5)   Pourquoi décida-t-il de rentrer d’urgence à Paris? Pourquoi accorda-t-il aux événement de Clochemerle plus d’importance  qu’à la conférence internationale?

6)   Pourquoi le président n’accepta-t-il pas de charger son ministre de présenter le plan français?

7) Commentez  les phrases suivantes :

a) Bref, toutes les nations tombaient d'accord sur une formule, qui se résumais d'un mot: " Désarmez"...

b) La France, c’est moi ! s’écria le président.

c) Cinq millions ! Avec ça, il n’y a pas d’opinion publique.

8) Réfléchissez aux paroles de Gabriel Chevallier : « La destinée des nations tient à peu de chose. On en a ici un nouvel exemple. » Commentez cette phrase. Comment, dans cette optique, pouvez-vous expliquer le titre du texte?






Révision générale
I.                 Remettez les événements de l’histoire dans leur ordre logique.
1)    Visite de la baronne chez l’archevêque de Lyon

2)    Arrivée de Bourdillat à Clochemerle

3)    Conversation entre le maire et Tafardel sur la grande place de Clochemerle

4)   Visite du chanoine Trude chez le ministre de l’intérieur

5)   Inauguration de la vespasienne

6)   Visite de Bourdillat chez Alexis Luvelat

7)   Départ de la délégation française de la conférence internationale
Racontez l’histoire en bref d’après le plan que vous avez obtenu.
II.              A qui appartiennent les paroles citées:

1)   - C'est une fripouille, une sale fripouille, ce Focart! Il cherche à me déboulonner par tous les moyens, pour faire son chemin.

2)   - Il y a l’Académie Française. On ne pense pas assez à l’Académie, à son rôle de contrepoids dans les décisions de certains hommes politiques ambitieux.

3)   - Quant aux vers, dit-il, je ne connais bien que les vers de terre.

4)   - Eh bien, puisque vous avez une idée ce n’est pas la peine de chercher davantage !

5)   - Vous plaisantez, mon cher Bourdillat! Vous, un de nos vieux républicains, un des piliers du parti, me déranger! Vous ne pouvez que me rendre service par vos conseils.

6)   - Et sachez ceci: la presse française n'est pas chère... Je suis placé pour le savoir.

7) - Il faut mettre à la raison ce Piéchut, le Tafardel et toute leur clique. Il faut agir en haut lieu.

8) - Il faut que nous trouvions quelque chose, Tafardel, qui montre la supériorité d’une municipalité avancée.
III.           Qui sont les personnages répondant aux caractéristiques suivantes :

1)   ... «un de ces petits arri­vistes sans scrupules, qui sont la plaie du parti et nous dégradent aux yeux du public» ;

2)   ... un brave homme mais un imbécile, un faible, incapable de faire respecter les droits de l’Eglise ;

3)   ... un profond penseur, sorte de philosophe campagnard, ascétique et incompris ;

4)   ... un homme politique qui sait bien ce qu’il faut faire en toutes circonstances;

5)   Récemment élu, il apparte­nait à l’extrême gauche du parti.  Il avait la fougue de la jeunesse qui a tout à gagner.

6)   ... grand, rouge de teint, encore blond. On sentait l’autorité dans sa voix et ses gestes rares.
IV.                     En analysant les textes, vous vous êtes déjà rendus à l’évidence que les paroles des hommes politiques ne correspondent pas toujours à leurs actes. Parmi les expressions données retrouvez celles qui font partie des propos démagogiques des politiciens et celles qui révèlent leurs vraies intensions.
faire pénétrer le progrès dans les campagnes ;

faire passer le bien-être général avant toute autre chose ;

n’avoir souci que de durer ;

diviser pour régner ;

être fidèle aux grands principes du part ;

placer plus haut que tout la liberté de pen­sée ;

savoir ce qu’il faut faire en toutes circonstances ;

se tailler un succès personnel ;

couper l’herbe sous les pieds ;

se rallier au clan du plus fort ;

songer à un avenir de paix et de prospérité ;

penser avant tout à désarmer l’adversaire ;

être de vrais Républicains.


Utilisez ces expressions pour développer le sujet « L’homme politique dans le roman de G.Chevallier « Clochemerle » » .

Vous pouvez aussi employer les mots introducteurs suivants :

 affirmer - утверждать

 prétendre – утверждать ( без достаточных оснований,

                    неискренне)

 se dire partisan de – провозглашать себя сторонником

 faire semblant de (feindre de)- делать вид

 à en croire les paroles de qn – если верить словам

 aux dires de qn – по словам

 contairement à qch - вопреки

V.            
Développez les sujets suivants :


Comment voyez-vous l’idéal de l’ homme politique ?


Faites le portrait d’un homme politique qui vous inspire le plus grand respect (le plus grand mépris).




[1] La Bourgogne, le Bordelais, l'Anjou – старинные французские провинции

[2] le Beaujolais – местность в Бургундии

[3] Brouilly, Morgon, Fleurie – города во Франции, знаменитые своими винами

[4] dont il fut parfois question dans la presse de l’époque – о которых в то время упоминалось в прессе

[5] quelque chose de plus original, qui soit mieux en rapport avec le programme du parti – что-нибудь более оригинальное, что было бы теснее связано с программой партии

[6]il n’y a rien de tel pour faire perdre à l’homme de Clochemerle toute envie de parler – ничто так не способствует тому, чтобы отбить у жителя Клошмерля всякое желание рассказывать

[7] Pour une idée, monsieur le maire, c’est une idée – Вот это мысль!

[8] Mesure égalitaire au plus haut point – мера, в высшей степени служащая упрочению всеобщего равенства

[9] Est-ce que le bien-être général ne doit passer avant toute autre chose? –Разве всеобщее благо не превыше всего?

[10] Le curé faisait meilleure recette à la quête – Кюре собирал больше пожертвований на нужды церкви.

[11] une vieille ganache tarée – старый продажный хрыч

[12] Vous aviez encore la morve au nez – Вы были еще сопляком.

[13] des alexandrins – александрийский стих

[14]  Il avait la fougue de la jeunesse qui a tout à gagner – Ему был свойственен пыл юности, у которой все впереди.

[15] nayant souci que de durer – заботясь лишь о том, чтобы остаться у власти

[16] à ce point affirmatifs – столь всем довольные

[17] Errare humanum est (лат.) – человеку свойственно ошибаться

[18] Et dire que ... – Подумать только

[19] cinq heures dhorlige – битых пять часов


[20] en prenant par le début – с самого начала

[21] Il faut mettre à la raison ce Piéchut - Надо образумить (поставить на место) этого Пьешю...

[22] Il faut agir en haut lieu - Надо действовать через высшие инстанции

[23] Je crois que nous pourrons toucher ces-gens-là par Luvelat . - Я полагаю, что мы сможем добраться до этих людей через посредство Лювла.

[24] sous la coupole – в стенах Академии

[25] C’est un bien gros mot – Это сильно сказано.

[26] les égards – почтительность, знаки внимания, уважения

[27] Les curés se foutent de nous. – Священники нас ни в грош не ставят.

[28] Et aprè? -  Ну и что с того?

[29] envenimer les rapports – испортить отношения

[30] Ce faisant – поступая таким образом

[31] couper l’herbe sous les pieds –  перебежать дорогу

[32] passer sur le ventre – переступить через труп, пройти по головам

[33] être dans les meilleurs termes – быть в нилучших отношениях

[34] raconter qch par-derrière – рассказывать что-либо за спиной у кого-либо

[35] Et tout y passe – И чего он только не приплетает…

[36] pots-de-vin - взятки

[37] Il est encore un mouchard par-dessus le marché! – Кроме всего прочего, он еще и доносчик!

[38] Les incidents de Clochemerle frappèrent de stupeur – события в Клошмерле привели в изумление

[39] porter les responsabilités d’un intérim gouvernemental – временно исполнять обязанности главы правительства

[40] ce qui revient à dire – что означает, иначе говоря

[41] tout va mal par excès darmement – дела обстоят плохо из6за избытка вооружений

[42] attendez-vous à recevoir nos relevés de factures – приготовьтесь к тому, что мы откажем вам в помощи

[43] la plus forte natalité – самая высокая рождаемость

[44] ce pays va sombrer dans l’anarchie – эта страна погрязнет в анархии

[45] mon ministère peut très bien sauter sur une histoire pareille – из-за этой истории мое правительство может рухнуть

[46] qui se taillera sur mon dos un succès personnel – который присвоит себе мой успех



[47] Je suis placé pour le savoir – кому как не мне это знать

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